09.03.2018 - RTS

La qualité des programmes est l’objet d’un suivi intensif

Le Conseil du public en séance ©RTSR/Anne Bichsel

La qualité des programmes est examinée à l’interne par les professionnels et à l’externe, par le Conseil du public.

Chaque unité d’entreprise de la SSR a son répondant qualité. Pour la RTS, c’est Luc Guillet. La qualité des programmes est examinée à l’interne par les professionnels et à l’externe, par le Conseil du public. Décryptage de ce double regard.

Luc Guillet connaît toutes les particularités du public de la RTS pour avoir pendant plus de 7 ans décortiqué, épluché, analysé les innombrables facettes des audiences (radio, tv, web) du média de service public. Depuis novembre 2016, le quadragénaire a pris du galon, devenant Secrétaire général du département Stratégie et Programmation auquel il était déjà rattaché. Un beau parcours qu’il a débuté à l’Université de Genève comme chercheur en sociologie.

Dans le cahier des charges actuel de Luc Guillet figure un volet important, celui du suivi de la qualité des programmes. Il en explique le fonctionnement.

La notion de qualité est sans cesse mise en avant. Elle est l’ADN du service public et ce qui lui permet de fidéliser son public. Mais en fait, qui définit la qualité?

Le concept qualité est apparu à l’article 3 de la Concession en 2006. Il est demandé aux divers domaines de programmes de la SSR de répondre à des exigences de cré- dibilité, sens des responsabilités, pertinence et professionnalisme journalistique. Ensuite, chaque unité d’entreprise a défini, en fonction de ces critères, quelles valeurs elle souhaitait établir. A l’époque, la RTS avait mis en avant: ouverture, créativité, proximité, indépendance, responsabilité. Le cumul de ces critères et valeurs définit en quelque sorte ce que devrait être la qualité à la RTS. C’est assez conceptuel, j’en conviens, mais l’idée est de se demander comment cela se traduit dans notre offre de tous les jours. Les producteurs ont-ils vraiment en tête ces valeurs ? Mon rôle, c’est d’opérer ce suivi de la qualité.

Qui est légitime pour évaluer la qualité?

Globalement, il y a un double suivi. Le premier point de vue sur la qualité des programmes vient du public, incarné par le Conseil du public. Le second est mené à l’interne, par les professionnels. Ce sont deux approches complètement différentes, mais complémentaires. La relation entre la RTS et le Conseil du public est riche. Leurs analyses et remarques sur les émissions sont toujours pertinentes et en même temps bienveillantes. Elles sont très écoutées. Nos directeurs de département se nourrissent vraiment des deux approches.

A l’interne, comment se met en place ce suivi qualité?

C’est un processus complexe qui intervient à différentes étapes. Une fois que le mandat d’une émission est posé, le suivi qualité peut démarrer. En phase de production par exemple, si les producteurs ou la direction ont des doutes sur un aspect du programme, ils peuvent demander qu’un sondage soit mis en place, avec les outils adéquats, parfois en ligne, sous le regard et l’expertise du service «Etudes et audiences» de Michel Racine. Le cas s’est posé pour une application où nous avions quatre options graphiques différentes. Ces sondages ne dictent pas ce que nous devons faire mais confirment ou infirment nos hypothèses et c’est fondamental d’être en phase avec les attentes du public. Enfin, après la diffusion, intervient le bilan qualité qui permet de mettre sous la loupe une dizaine d’émissions par an.

A partir de quelles grilles d’analyse établissez-vous ces bilans qualité?

Premièrement, ce bilan qualité des émissions englobe une analyse quantitative et qualitative détaillée fournie par le service «Etudes et audiences». Cela nous permet de vérifier si nous avons touché notre public cible, d’observer comment se comporte le public tout au long de l’émission, de pointer les fluctuations d’audience mais aussi de connaître la perception du public.

Le second volet du bilan qualité est en lien avec la stratégie de l’entreprise. Celle-ci se définit à partir des critères de la concession, des valeurs de la RTS et de la straté- gie de l’offre qu’elle a récemment établie, à savoir: être grand public, afficher la différence (autrement dit, en quoi le service public se distingue des chaînes privées), miser le plus possible sur le direct, exploiter toutes les plateformes (en mettant l’accent sur l’innovation) et enfin reconquérir le public des 15-34 ans. L’objectif n’est pas de faire du jeunisme, mais de ne pas perdre de vue ce jeune public aux comportements médiatiques différents, qui va vieillir. C’est donc à partir de ces chapitres et de l’audience que les discussions sont menées.

En ayant des axes d’analyse très précis, vous limitez la dimension affective de ces bilans qualité?

Ce n’est pas une réunion d’amis qui se congratulent sur des critères ! Il y a de vrais enjeux. Lorsqu’on analyse les audiences, l’acceptation ou non d’une émission par le public, il règne une tension assez positive mais il s’agit toujours d’un échange entre toutes les personnes qui travaillent sur l’offre. Le monsieur Qualité n’est pas le juge à la RTS! Le suivi qualité peut porter sur plein d’éléments, typiquement la bonne utilisation du français sur nos antennes. Régulièrement, les chefs d’unité font des retours aux journalistes. On sent une intention collective pour viser ce haut niveau de qualité dans nos émissions. En termes de formation, la qualité est également une thématique à développer: comment est-ce qu’on forme nos journalistes au niveau d’exigences qu’induit le mandat de service public ?

Vous êtes délégué à la qualité pour la RTS. Rencontrez-vous les répondants des autres unités d’entreprise?

Oui, au minimum deux fois par an, avec également le répondant qualité qui chapeaute le secteur à Berne. Nous échangeons autour de nos expériences et méthodes de suivi, assez différentes d’une région à l’autre. A la SRF, ils procèdent par «quality check»: les mandats sont très détaillés et chaque point est évalué en fonction. A la RSI, ils ne mènent pas d’études auprès du public mais régulièrement, en interne, un petit panel de professionnels, non pas des producteurs, mais des employés d’horizons divers sont appelés à faire un retour sur une émission. Ils travaillent de manière très collégiale et leur analyse est transmise aux responsables de l’offre et à la direction.

En tant que sociologue, y a-t-il un domaine où vous pouvez amener un regard novateur au sein de votre département Stratégie et Programmation?

Outre le suivi de qualité des programmes, je coordonne et préside le groupe de veille stratégique de la RTS. Avec trois collègues nous observons et analysons l’évolution de la production, de la distribution et de la consommation de l’offre audiovisuelle et numérique. Luc Mariot (adjoint à la direction de Société & Culture) s’occupe de la veille programmatique, Serge Gremion (chef du Labo numérique) est en charge de la veille numérique et Mathias Coinchon (chef Unité Projets & Développement) du département Opérations, fournit la veille technologique. A partir de là, nous réalisons chaque mois un billet de veille, à l’interne pour la RTS, et maintenant aussi pour la SSR. C’est une démarche très appréciée. Cette vision des dernières innovations aide à se projeter dans le futur. Et puis régulièrement, nous allons au Conseil de direction de la RTS, nourrir les directeurs des grandes tendances perçues dans les derniers mois. Nous abordons des thématiques telles que les nouveaux moyens légers de production, le renouveau des émissions en plateau, l’intelligence artificielle ou la place à accorder à la réalité virtuelle dans notre offre du futur, c’est vaste.

Ces veilles ont-elles débouché sur des applications concrètes?

Typiquement, il y a quelques années, toutes les déclinaisons de notre offre sur les réseaux sociaux sont parties de la veille stratégique. Le Conseil de direction a décidé, suite à ça, d’intégrer les réseaux sociaux dans sa stratégie et son organisation.

Texte:Médiatic/Marie-Françoise Macchi