18.12.2017 - Info

Interview de Laurent Wehrli, président du comité contre « No Billag »

©Gaëtan Bally

« Ce qui importe à notre association, c’est que les citoyens aillent voter en ayant lu le texte de l’initiative »

Le 2 novembre était créée à Lausanne « L’Association contre la disparition des radios et TV » qui ferraille dur contre l’initiative « No Billag ». Laurent Wehrli a pris la tête de son comité. Le Vaudois, syndic de Montreux, est fortement ancré à l’échelle régionale, mais également au niveau fédéral en tant que Conseiller national. Il met en garde contre les conséquences probables si le peuple acceptait «No Billag» le 4 mars 2018 : service public démantelé, radios et TV régionales gangrénées par le manque de financement, 4000 emplois menacés en Suisse romande. Une situation inacceptable pour le PLR vaudois.

Qu’est-ce qui vous fait si peur si l’initiative «No Billag» est acceptée ?

Ce qui importe à notre association, c’est que les citoyens aillent voter en ayant lu le texte de l’initiative. Il est très clair : c’est zéro franc pour la redevance ! Il ne propose aucune alternative. Cet aspect jusqu’auboutiste devrait faire réfléchir la population aux conséquences. Après les votations, on entend souvent dire, « finalement, ce n’était pas ce que je voulais ! »

C’est ce qui explique cette mobilisation massive contre « No Billag » chez nous ?

On a tous en mémoire l’initiative contre l’immigration de masse, le 9 février 2014, où tout le monde était sûr qu’elle échouerait. Or, elle a passé, en grande partie parce que les milieux concernés ne se sont pas mobilisés. Pour contrer « No Billag », on a voulu se démarquer du traditionnel comité interpartis constitué uniquement de politiques. En Suisse romande, on a souhaité mettre sur pied une association où toutes les personnes concernées peuvent se retrouver. Car la question est vaste, elle interroge aussi sur la place de la culture et du sport dans nos régions. Si certains événements ne sont plus filmés par la RTS, ils seront moins attractifs pour les sponsors. Je l’ai expérimenté avec la Fête fédérale de musique à Montreux qui a suscité de l’intérêt quand j’ai expliqué comment elle allait être couverte par la RTS. Une entreprise qui place de la publicité veut avoir, en retour, de la visibilité. Ce n’est pas pour rien si les milieux sportifs se mobilisent, à commencer par Swiss Olympic dont le président Jürg Stahl, par ailleurs Conseiller national UDC, s’est engagé à faire campagne contre l’initiative.

Mais les télés régionales ne prendraient-elle pas le relais ?

Les TV régionales privées sont soutenues à raison de 50 à 75% par la redevance. Elles disparaîtraient toutes, sauf une, à Zurich. Il y a bien l’idée qui consiste à mettre aux enchères des concessions. Mais imaginez une télévision privée alémanique au bénéfice d’une concession : quel intérêt auraitelle à couvrir toutes les étapes du Tour de Romandie ? Aucun, vus les coûts de production. Elle se limiterait à diffuser quelques reflets. Et quelle entreprise voudrait acheter une concession en romanche ? Peutêtre EMS-Chemie ? Ce média pourrait alors être orienté. Sans vouloir faire allusion à Christoph Blocher, je veux démontrer les dangers d’une concession entre les mains d’une entreprise. La diversité des investisseurs est la garante d’une information neutre.

Quel est le plan médias prévu par votre association ?

Nous avons démarré avec une communication institutionnelle. Dès janvier, elle sera plus personnalisée, avec une forte présence sur les réseaux sociaux. Des dirigeants sportifs, culturels, chefs d’entreprise, artistes…, témoigneront sur notre page Facebook. Certains n’ont pas l’habitude de s’engager dans la politique. Nous attendons la réponse de plusieurs personnalités connues.

Enfin, quelles sont vos émissions incontournables ?

Plus qu’une émission précise, ce qui m’importe, c’est la capacité qu’on a, par cette radio et télévision suisse et évidemment romande, d’avoir une information sur l’ensemble de la Suisse. Si l’info venait à être concentrée à 90% sur Zurich et sa région, je crains qu’au fur et à mesure, nous nous éloignerions du lien confédéral. Il y a là aussi un enjeu politique important d’équilibre d’images entre les régions du pays.

Texte: Marie-Françoise Macchi/Médiatic